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.»En parlant, il poussa avec colère la vaste table qui remplissait presque la chambre, et que surchargeaient des papiers et des portefeuilles sans nombre.Louis fut tiré de son apathique méditation par l’excès d’audace de ce discours ; il leva la tête et sembla un instant avoir pris une résolution par crainte d’en prendre une autre.– Eh bien, monsieur, je répondrai que je veux régner par moi seul.– À la bonne heure, dit Richelieu, mais je dois vous prévenir que les affaires du moment sont difficiles.Voici l’heure où l’on m’apporte mon travail ordinaire.– Je m’en charge, reprit Louis ; j’ouvrirai les porte-feuilles, je donnerai mes ordres.– Essayez donc, dit Richelieu ; je me retire, si quelque chose vous arrête, vous m’appellerez.Il sonna : à l’instant même et comme s’ils eussent attendu le signal, quatre vigoureux valets de pied entrèrent et emportèrent son fauteuil et sa personne dans un autre appartement ; car, nous l’avons dit, il ne pouvait plus marcher.En passant dans la chambre où travaillaient les secrétaires, il dit à haute voix :– Qu’on prenne les ordres de Sa Majesté.Le Roi resta seul.Fort de sa nouvelle résolution, et fier d’avoir une fois résisté, il voulut sur-le-champ se mettre à l’ouvrage politique.Il fit le tour de l’immense table, et vit autant de portefeuilles que l’on comptait alors d’Empires, de Royaumes et de cercles dans l’Europe ; il en ouvrit un et le trouva divisé en cases, dont le nombre égalait celui des subdivisions de tout le pays auquel il était destiné.Tout était en ordre, mais dans un ordre effrayant pour lui, parce que chaque note ne renfermait que la quintessence de chaque affaire, si l’on peut parler ainsi, et ne touchait que le point juste des relations du moment avec la France.Ce laconisme était à peu près aussi énigmatique pour Louis que les lettres en chiffres qui couvraient la table.Là , tout était confusion : sur des édits de bannissement et d’expropriation des Huguenots de la Rochelle se trouvaient jetés les traités avec Gustave-Adolphe et les Huguenots du Nord contre l’Empire ; des notes sur le général Bannier, sur Walstein, le duc de Weimar et Jean de Wert, étaient roulées pêle-mêle avec le détail des lettres trouvées dans la cassette de la Reine, la liste de ses colliers et des bijoux qu’ils renfermaient et la double interprétation qu’on eût pu donner à chaque phrase de ses billets.Sur la marge de l’un d’eux étaient ces mots : Sur quatre lignes de l’écriture d’un homme, on peut lui faire un procès criminel.Plus loin étaient entassées les dénonciations contre les Huguenots, les plans de république qu’ils avaient arrêtés ; la division de la France en Cercles, sous la dictature annuelle d’un chef ; le sceau de cet État projeté y était joint représentant un ange appuyé sur une croix, et tenant a la main la Bible, qu’il élevait sur son front.À côté était une liste des cardinaux que le Pape avait nommés autrefois le même jour que révoque de Luçon (Richelieu).Parmi eux se trouvait le marquis de Bédémar, ambassadeur et conspirateur à Venise.Louis XIII épuisait en vain ses forces sur des détails d’une autre époque, cherchant inutilement les papiers relatifs à la conjuration, et propres à lui montrer son véritable nœud et ce que l’on avait tenté contre lui-même, lorsqu’un petit homme d’une figure olivâtre, d’une taille courbée, d’une démarche contrainte et dévote, entra dans le cabinet : c’était un secrétaire d’État, nommé Desnoyers ; il s’avança en saluant :– Puis-je parler à Sa Majesté des affaires du Portugal ? dit-il.– D’Espagne, par conséquent, dit Louis ; le Portugal est une province d’Espagne.– De Portugal, insista Desnoyers.Voici le manifeste que nous recevons à l’instant.Et il lut :« Don Juan, par la grâce de Dieu, roi de Portugal, des Algarves, royaumes deçà l’Afrique, seigneur de la Guinée, conqueste, navigation et commerce de l’Esthiopie, Arabie, Perse et des Indes… »– Qu’est-ce que tout cela ? dit le Roi ; qui parle donc ainsi ?– Le duc de Bragance, roi de Portugal, couronné il y a déjà une… il y a quelque temps, Sire, par un homme appelé Pinto.À peine remonté sur le trône, il tend la main à la Catalogne révoltée.– La Catalogne se révolte aussi ! Le roi Philippe IV n’a donc plus pour premier ministre le Comte-duc ?– Au contraire, Sire, c’est parce qu’il l’a encore.Voici la déclaration des États-Généraux catalans à Sa Majesté Catholique, contenant que tout le pays prend les armes contre ses troupes sacrilèges et excommuniées.Le roi de Portugal…– Dites le duc de Bragance, reprit Louis ; je ne reconnais pas un révolté.– Le duc de Bragance donc, Sire, dit froidement le conseiller d’État, envoie à la PRINCIPAUTÉ de Catalogne son neveu, D.Ignace de Mascarenas, pour s’emparer de la protection de ce pays (et de sa souveraineté peut-être, qu’il voudrait ajouter à celle qu’il vient de reconquérir).Or, les troupes de Votre Majesté sont devant Perpignan.– Eh bien, qu’importe ? dit Louis.– Les Catalans ont le cœur plus français que portugais, Sire, et il est encore temps d’enlever cette tutelle au roi de… au duc de Portugal
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