[ Pobierz całość w formacie PDF ]
.J’entendis sonner les trompettes et alors j’aperçus le sabre de mon cavalier, brandi au-dessus de mon oreille droite.Le capitaine Nicholls se pencha en avant sur sa selle et me lança au grand galop.Le tintamarre et la poussière, les vociférations des hommes à mes oreilles eurent de l’emprise sur moi, me maintenant à un degré d’allégresse que je n’avais jamais ressenti.Je m’envolai sur le terrain, bien loin en tête de tous les autres – sauf un.Un seul cheval demeura avec moi : le luisant étalon noir.Bien que le capitaine Nicholls et le capitaine Stewart n’eussent pas échangé une parole, je sentis qu’il devenait soudain important que je ne laisse pas ce cheval me dépasser.Un simple coup d’œil me dit qu’il pensait de même, car il y avait une détermination farouche dans ses yeux et la concentration creusait des sillons sur son front.Quand nous submergeâmes les positions ennemies, nos deux cavaliers arrivèrent tout juste à nous faire faire halte.Finalement, nous nous retrouvâmes nez à nez, soufflant, haletant, et les deux capitaines hors d’haleine après l’effort.— Tu vois, Jamie, je te l’avais dit, déclara le capitaine Nicholls.Quelle fierté il avait dans la voix en parlant ! C’est le cheval dont je t’avais parlé – découvert au fin fond du Devon.Si nous avions poursuivi encore longtemps, ton Topthorn aurait peiné pour coller à lui.Tu ne peux pas dire le contraire.D’abord, Topthorn et moi nous nous regardâmes avec circonspection.Il était plus grand que moi d’un travers de main, peut-être davantage.C’était un cheval énorme, luisant de santé.Son port de tête était d’une dignité majestueuse.Je rencontrais là le premier cheval dont je sentais que sa force pouvait être pour moi un défi.Mais il y avait aussi dans ses yeux une bonté qui ne recelait aucune menace à mon égard.— Topthorn est la plus belle monture de ce régiment, et de tous les autres, dit le capitaine Jamie Stewart.Joey est peut-être plus rapide, et je veux bien admettre qu’il a tout aussi bonne façon que les autres chevaux que j’ai vu traîner une carriole à lait, mais pour ce qui est de l’endurance, Topthorn n’a pas son pareil.Il aurait pu continuer indéfiniment – et comment ! Cette bête, c’est un vrai moteur de quarante chevaux !Ce soir-là , tandis que nous rentrions à la caserne, les deux officiers discutaient des mérites de leurs chevaux respectifs.Topthorn et moi cheminions pesamment, épaule contre épaule, la tête basse, notre énergie épuisée par le soleil et notre long galop.Cette nuit-là , on nous mit côte à côte dans l’écurie et, le lendemain, à bord, nous nous trouvâmes de nouveau ensemble dans les entrailles du paquebot converti en transport de troupes qui allait nous amener en France et là -bas à la guerre.6À bord du bateau régnait autour de nous une atmosphère de grande exubérance et d’attente confiante.Les soldats débordaient d’optimisme comme s’ils s’embarquaient pour quelque grand pique-nique militaire.Aucun ne paraissait inquiet le moins du monde.Tandis qu’ils nous soignaient dans nos stalles, les cavaliers plaisantaient et riaient de conserve comme jamais je ne les avais entendus rire et plaisanter.Et nous allions avoir bien besoin d’être entourés de leur confiance, car la traversée fut mauvaise : nombre d’entre nous devinrent craintifs et tendus alors que le bateau était follement secoué par la mer.Certains ruaient contre les stalles, dans un effort désespéré pour se libérer et trouver un sol qui ne tangue pas, qui ne se dérobe pas sous leurs pieds.Mais nos cavaliers étaient toujours là pour nous maintenir et nous réconforter.Pour moi, toutefois, ce réconfort ne me vint pas du brigadier Samuel Perkins, qui me tenait la tête dans les moments les plus critiques ; en effet, même lorsqu’il me flattait, c’était de façon si impérieuse que je n’avais pas l’impression qu’il était sincère.Non, le réconfort me vint de Topthorn qui conserva son calme de bout en bout.Il penchait sa grande tête par-dessus la stalle et me laissait reposer sur son encolure tandis que j’essayais de chasser de mon esprit les plongeons et les bonds du navire, en même temps que le vacarme des chevaux autour de moi, dans leur terreur panique.Mais l’humeur changea dès l’arrivée à quai.Les chevaux retrouvèrent leur sérénité quand ils sentirent à nouveau la terre ferme et stable sous leurs sabots ; en revanche, les soldats devinrent silencieux, sombres, quand nous croisâmes d’interminables files de blessés qui attendaient de monter à bord pour être rapatriés en Angleterre.Au moment du débarquement, tandis qu’on nous emmenait le long du quai, le capitaine Nicholls marchait à ma hauteur.Il avait détourné les yeux vers la mer, afin que personne ne pût y remarquer ses larmes.Des blessés partout – sur des civières, sur des béquilles, dans des ambulances découvertes et, gravée sur le visage de chacun de ces hommes, l’expression d’une douleur et d’une souffrance pitoyables.Ils essayaient de faire bonne figure, mais même les plaisanteries, les moqueries qu’ils lançaient au passage étaient chargées de mélancolie et de sarcasme
[ Pobierz całość w formacie PDF ]