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.Un tableau affÔ-chait des visages, des prénoms.J'avançais comme une bille de flipper.J'étais dans un flipper.Je m'étais réveillé, en sueur.Secoué énergiquement.Tilt.Gélou était devant moi.Les yeux ensommeillés.- «a va! avait-elle demandé, inquiète.lb as crié.- «a va.Un cauchemar.«a m'arrive quand je dors sur cette saloperie de canapé.108MLElle avait regardé la bouteille de whisky et mon verre vide.Et que tu forces sur l'alcool.J'avais haussé les épaules et m'étais assis.La tête lourde.Retour sur terre.Il était quatre heures du matin.- Désolé.- Viens te coucher avec moi.U seras mieux.Elle m'avait tiré par la main.Aussi douce et chaude que lorsqu'ehe avait dix-huit ans.Sensuelle, et mater-neue.La douceur, Guiton avait d˚ l'apprendre dans ces mains-là , quand elles se posent sur vos joues pour vous faire un petit bison sur le front.Comment avaient-ils pu rater leur rendez-vous, tous les deux?Pourquoi, bon sang!Dans le lit, Gélou s'était retournée et immédiatement rendormie.Je n'avais plus osé bouger, de peur de la réveiller à nouveau.Nous devions avoir douze ans la dernière fois que nous avions dormi ensemble.Cela arrivait souvent, quand nous étions gamins.Presque tous les samedis soir, en été, toute la famille se retrouvait ici, aux Goudes.Nous les enfants, on nous mettait tous à dormir sur des matelas, par terre.Gélou et moi, on était les premiers au lit.On s'endormait en se tenant la main, en écoutant les rires et les chansons de nos parents.Bercés par les Maruzzella, Guaglione et autres refrains napolitains popularisés par Renato Carosone.Plus tard, quand ma mère tomba malade, Gélou se 109mit à venir deux ou trois soirs par semaine à la maison.Elle faisait la lessive, le repassage et préparait le repas.Elle arrivait sur ses seize ans.A peine couchés, elle se blottissait contre moi et on se racontait des histoires horribles.A se faire des peurs pas possibles.Alors, elle glissait sa jambe entre les miennes, et on se serrait encore plus fort l'un contre l'autre.Je sentais ses seins, déjà bien formés, et leur téton tout dur sur ma poitrine.Cela m'excitait comme un fou.Elle le savait.Mais, bien s˚r, nous 'n'en parlions pas, de ça, de ces choses qui appartenaient encore aux grands.Et nous nous endormions ainsi, pleins de tendresse et de certitudes.Je m'étais retourné doucement, pour remettre à leur place ces souvenirs, fragiles comme du cristal.Pour repousser ce désir de poser ma main sur son épaule et de la prendre dans mes bras.Comme avant.Juste pour chasser nos peurs.J'aurais d˚.Fonfon me trouva une sale tête.- Ouais, dis-je, on ne choisit pas toujours la tête qu'on veut.- Oh, et puis monsieur a mal dorrm' aussi.Je souris, et m'assis sur la terrasse.A ma place habituelle.Face à la mer.Fonfon revint avec un caféet Le Provençal.- Té! Je te l'ai fait serré.Je sais pas si ça va te réveiller, mais au moins, y te rendra peut-être poli.J'ouvris le journal et partis à la recherche d'un article sur l'assassinat de Serge.Il n'avait droit qu'à un petit article.Sans commentaire, ni détails.On ne 110rappelait même pas que Serge avait été éducateur de rues dans ces cités pendant plusieurs années.Il était qualifié de "sans profession", et l'article se terminait par un laconique "la police penche pour un règlement de compte entre voyous".Pertin avait d˚ faire un rapport des plus succints.Pour une histoire de voyous, il n'y aurait pas d'enquête.C'est ça que cela voulait dire.Et que Pertin gardait l'affaire pour lui.Comme un os à ronger.Uos en question, ça pouvait être moi, tout simplement.Je tournai machinalement la page en me levant pour aller chercher La Marseillaise.Le gros titre, en tête de la page 5, me figea sur place : "Le double assassinat du Panier: le cadavre d'un jeune homme à moitié nu non identifié." Au centre de l'article, en encadré : "Le propriétaire de la maison, l'architecte Adrien Fabre, bouleversé."Je m'assis, sonné.Ce n'était peut-être que la somme de cdfncidences.Je me dis ça, pour pouvoir lire l'article sans trembler.J'aurais donné ma vie pour ne pas voir les lignes qui s'étalaient sous mes yeux.Car je savais ce que j'allais y découvrir.Un frisson me parcourut l'échine.Adrien Fabre, architecte bien connu, hébergeait depuis trois mois Hocine Draoui, un historien algérien, spécialiste de la Méditerranée antique.Menacé de mort par le Front islamique du Salut (FIS), celui-ci, comme un grand nombre d'intel-lectuels algériens, avait fuit son pays.Il venait de demander le statut d'exilé politique.Bien s˚r, on pensait immédiatement à une action du FIS.Mais, pour les enquêteurs, c'était Plutôt improbable.Jusqu'à ce jour, il n'y avait eu - officiellement, il est vrai - qu'une seule exécution revendi-quée, celle à Paris, de l'imman Sahraoui, le 11 juillet 1995.Plusieurs dizaines de Hocine Draoui vivaient en France.Pourquoi lui et pas un autre? Et puis, comme le reconnaissait Adrien Fabre, Hocine Draoui n'avait jamais fait état devant lui d'une quelconque menace de mort.Il n'était inquiet que du sort de sa femme restée en Algérie, et qui devait le rejoindre dès que son statut serait réglé.Adrien Fabre évoquait son amitié avec Hocine Draoui, qu'il avait rencontré une première fois en 1990, lors d'un grand colloque autour de "Marseille grecque et la Gaule".Ses travaux, sur la situation du port - phénicien, puis romain - devaient, selon lui, renouveler l'histoire de notre ville et l'aider à enfÔn recouvrir sa mémoire.Sous le titre "Au commencement était la mer", le journal publiait des extraits de l'intervention de Hocine Draoui lors de ce colloque.Pour l'heure, la thèse du cambriolage qui tourne mal était celle retenue par la police.Les cambriolages au Panier étaient fréquents.Cela freinait d'ailleurs la politique de rénovation du quartier.Les nouveaux arrivants, de classe aisée en majorité, étaient la cible des malfrats, de jeunes Arabes pour la plupart.Certaines maisons ayant même été visitées trois ou quatre fois à quelques mois d'intervalles, contrai-gnant ainsi les nouveaux propriétaires à quitter le Panier, écoeurés.112C'était la première fois que la maison des Fabre était cambriolée.Aflaient-ils déménager? Sa femme, son fils et lui étaient encore trop bouleversés pour penser à ça.Restait l'énigme du second cadavre
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