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.Mais cela est incroyable, s'écriaient de vieux courtisans; la faveur de sa tante lui tourne tout à fait la tête.mais, grâce au ciel, cela ne durera pas; notre souveraine n'aime pas que l'on prenne de ces petits airs desupériorité.La duchesse s'approcha du prince; les courtisans qui se tenaient à distance fort respectueuse de la table de jeu,de façon à ne pouvoir entendre de la conversation du prince que quelques mots au hasard, remarquèrent queFabrice rougissait beaucoup."Sa tante lui aura fait la leçon, se dirent-ils, sur ses grands airsd'indifférence."Fabrice venait d'entendre la voix de Clélia, elle répondait à la princesse qui, en faisant son tourdans le bal, avait adressé la parole à la femme de son chevalier d'honneur.Arriva le moment où Fabrice dutchanger de place au whist; alors il se trouva précisément en face de Clélia, et se livra plusieurs fois au plaisirde la contempler.La pauvre marquise, se sentant regardée par lui, perdait tout à fait contenance.Plusieurs foiselle oublia ce qu'elle devait à son voeu: dans son désir de deviner ce qui se passait dans le coeur de Fabrice,elle fixait les yeux sur lui.Le jeu du prince terminé, les dames se levèrent pour passer dans la salle du souper.Il y eut un peu dedésordre.Fabrice se trouva tout près de Clélia; il était encore très résolu, mais il vint à reconnaître un parfumtrès faible qu'elle mettait dans ses robes; cette sensation renversa tout ce qu'il s'était promis.Il s'approchad'elle et prononça à demi-voix et comme se parlant à soi-même, deux vers de ce sonnet de Pétrarque, qu'il luiavait envoyé du lac Majeur, imprimé sur un mouchoir de soie:Quel n'était pas mon bonheur quand le vulgaire me croyait malheureux, et maintenant que mon sort estchangé!"Non, il ne m'a point oubliée, se dit Clélia avec un transport de joie.Cette belle âme n'est point inconstante!"Non, vous ne me verrez jamais changer,Beaux yeux qui m'avez appris à aimer.CHAPITRE XXVI 252La Chartreuse de ParmeClélia osa se répéter à elle-même ces deux vers de Pétrarque'.La princesse se retira aussitôt après le souper; le prince l'avait suivie jusque chez elle, et ne reparut point dansles salles de réception.Dès que cette nouvelle fut connue, tout le monde voulut partir à la fois; il y eut undésordre complet dans les antichambres, Clélia se trouva tout près de Fabrice; le profond malheur peint dansses traits lui fit pitié.Oublions le passé, lui dit-elle, et gardez ce souvenir d'amitié.En disant ces mots, elle plaçait son éventail de façon à ce qu'il pût le prendre.Tout changea aux yeux de Fabrice; en un instant il fut un autre homme; dès le lendemain il déclara que saretraite était terminée, et revint prendre son magnifique appartement au palais Sanseverina.L'archevêque ditet crut que la faveur que le prince lui avait faite en l'admettant à son jeu avait fait perdre entièrement la tête àce nouveau saint; la duchesse vit qu'il était d'accord avec Clélia.Cette pensée, venant redoubler le malheurque donnait le souvenir d'une promesse fatale, acheva de la déterminer à faire une absence.On admira safolie.Quoi! s'éloigner de la cour au moment où la faveur dont elle était l'objet paraissait sans bornes! Lecomte, parfaitement heureux depuis qu'il voyait qu'il n'y avait point d'amour entre Fabrice et la duchesse,disait à son amie:Ce nouveau prince est la vertu incarnée, mais je l'ai appelé cet enfant: me pardonnera-t-il jamais? Je nevois qu'un moyen de me remettre réellement bien avec lui, c'est l'absence.Je vais me montrer parfait de grâceset de respects, après quoi je suis malade et je demande mon congé.Vous me le permettrez, puisque la fortunede Fabrice est assurée.Mais me ferez-vous le sacrifice immense, ajouta-t-il en riant, de changer le titresublime de duchesse contre un autre bien inférieur? Pour m'amuser, je laisse toutes les affaires ici dans undésordre inextricable; j'avais quatre ou cinq travailleurs dans mes divers ministères, je les ai fait mettre à lapension depuis deux mois, parce qu'ils lisent les journaux en français; et je les ai remplacés par des nigaudsincroyables."Après notre départ, le prince se trouvera dans un tel embarras, que, malgré l'horreur qu'il a pour le caractèrede Rassi je ne doute pas qu'il soit obligé de le rappeler, et moi je n'attends qu'un ordre du tyran qui dispose demon sort, pour écrire une lettre de tendre amitié à mon ami Rassi, et lui dire que j'ai tout lieu d'espérer quebientôt on rendra justice à son mérite."CHAPITRE XXVIICette conversation sérieuse eut lieu le lendemain du retour de Fabrice au palais Sanseverina; la duchesse étaitencore sous le coup de la joie qui éclatait dans toutes les actions de Fabrice."Ainsi, se disait-elle, cette petitedévote m'a trompée! Elle n'a pas su résister à son amant seulement pendant trois mois."La certitude d'un dénouement heureux avait donné à cet être si pusillanime, le jeune prince, le couraged'aimer; il eut quelque connaissance des préparatifs de départ que l'on faisait au palais Sanseverina; et sonvalet de chambre français, qui croyait peu à la vertu des grandes dames, lui donna du courage à l'égard de laduchesse.Ernest V se permit une démarche qui fut sévèrement blâmée par la princesse et par tous les genssensés de la cour; le peuple y vit le sceau de la faveur étonnante dont jouissait la duchesse.Le prince vint lavoir dans son palais.CHAPITRE XXVII 253La Chartreuse de ParmeVous partez, lui dit-il d'un ton sérieux qui parut odieux à la duchesse, vous partez; vous allez me trahir etmanquer à vos serments! Et pourtant, si j'eusse tardé dix minutes à vous accorder la grâce de Fabrice, il étaitmort.Et vous me laissez malheureux! et sans vos serments je n'eusse jamais eu le courage de vous aimercomme je fais! Vous n'avez donc pas d'honneur!Réfléchissez mûrement, mon prince
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